Le varroa destructor est un acarien parasitaire qui impacte l’abeille domestique Apis mellifera. Il représente l’une des plus importantes menaces actuelles en apiculture. Sa dangerosité est attribuable à sa répartition dans plusieurs régions du monde, à la gravité des maladies qu’il provoque (la varroose) et aux coûts et aux délais exigés pour le contrôler et le traiter.
Origine du varroa destructor
La première trace du varroa remonte à 1904.
En 1904, l’entomologiste Edward Jacobson découvre pour la première fois des petits acariens sur des abeilles Apis cerana sur l’île de Java, une île indonésienne. Il envoie ces acariens aux Pays-Bas, où Anthonie Cornelis Oudemans, un expert en acariens néerlandais, les étudie. Pour honorer celui qui les a découverts, il les nomme « Varroa jacobsoni », c’est-à-dire Edward Jacobson.
L’abeille qu’Edward Jacobson a étudiée, l’apis cerana, est une des 9 espèces d’abeilles de genre Apis qui existent sur terre. Huit espèces de genre apis se trouvent en Asie, tandis qu’en Europe et en Afrique nous n’avons qu’une espèce d’abeille : l’apis mellifera.
L’abeille d’Europe (Apis mellifera) vit en équilibre avec le varroa parce que les abeilles peuvent s’épouiller mutuellement pour se débarrasser de ce parasite.
Un autre facteur d’équilibre entre l’apis cerna et le varroa est le cycle de naissance de l’apis cerna, qui dure 17 jours, contre 21 jours pour l’apis mellifera.
Le varroa se reproduisant dans les cellules des abeilles qui vont naître, voilà un autre facteur qui explique la fragilité de notre abeille.
Biologie, cycle de vie et alimentation du varroa destructor
Le varroa est un acarien sexué.
Il existe ainsi des mâles et des femelles, voici comment vous pouvez le reconnaître.
Varroa mâle
Ils mesurent entre 0,7 à 0,9mm sur 0,7 à 0,8mm.
Ils sont de couleur beige clair. Les mâles ne sont généralement pas visibles en dehors des cellules de couvain : ils ne peuvent pas se nourrir seuls et se dessèchent dès que la cellule est désoperculée.
Varroa femelle
Elles mesurent 1,6mm de large pour 1,1mm de long et c’est possible de les repérer à l’œil nu.
Elles sont de couleur beige foncé à brun rougeâtre.
Je vais focaliser la description de la biologie du varroa sur les femelles varroas, car ce sont elles qui posent problème pour nos apis mellifera.
Morphologie de la femelle varroa
Le varroa femelle porte 4 paires de pattes, donc 8 pattes en tout. L’extrémité de chaque patte dispose d’une sorte de ventouse qui permet au varroa d’adhérer au support.
La femelle varroa a une forme et une structure spéciales. Ce qui en fait un parasite externe très efficace (hélas) pour les abeilles.
Elle a un corps large et plat, avec des pattes sur les côtés, ce qui lui permet de se faufiler facilement sur l’abdomen des abeilles adultes.
Grâce à sa morphologie, la femelle varroa peut :
- Éviter d’être enlevée quand l’abeille essaie de se nettoyer.
- Se nourrir en se glissant entre les parties du corps de l’abeille, dans les parties fragiles
- Se déplacer facilement dans les cellules contenant des larves d’abeilles
Cycle de vie du varroa
Le cycle de vie du varroa destructor est étroitement lié à celui de l’abeille domestique. Le varroa se reproduit dans le couvain des abeilles.
En l’absence de couvain dans la colonie, la population de ces acariens ne peut pas croître.
Le varroa a un cycle de vie en deux phases :
- Première phase : reproduction dans le couvain
- Deuxième phase : phorésie (dispersion) sur les abeilles adultes. On parle alors de varroa phorétique
Voici en détail le cycle de développement du varroa destructor :
- Invasion de la cellule de couvain: Une femelle varroa mature entre dans une cellule de couvain d’abeille juste avant qu’elle ne soit operculée.
- Ponte et Développement: À l’intérieur de la cellule, la femelle pond plusieurs œufs. Le premier œuf donne naissance à un mâle, et les suivants à des femelles.
- Accouplement: Les jeunes varroas femelles s’accouplent avec le mâle, souvent leur frère, à l’intérieur de la cellule.
- Émergence (phorésie): Lorsque l’abeille adulte émerge de la cellule, les varroas femelles matures sortent également et cherchent de nouvelles cellules de couvain à infester.
Le couvain des mâles est infesté 8 fois plus que celui des ouvrières.
En période d’élevage du couvain d’abeilles, 80% des varroas sont dans le couvain, c’est à dire caché, et les 20% restants sont sur les abeilles adultes
Varroa et varroose – guide fnosad
Alimentation du varroa et conséquences
Les varroas, grâce à leur morphologie particulière, se faufilent sous des segments du corps des abeilles adultes
Le varroa destructor se nourrit de l’hémolymphe (sang) et des corps gras des abeilles. Deux composants vitaux pour la santé et le développement des abeilles.
Les varroas ont d’ailleurs une préférence pour les abeilles qui ont le rôle de nourrices. Cela s’explique parce « qu’elles ont un taux plus élevé de protéines et des corps gras plus développés » (Guide FNOSAD « Varroa et varroose » p24)
Voici comment le varroa fait pour se nourrir :
- Perforation de la cuticule: Le varroa utilise ses pièces buccales acérées pour percer la cuticule (c’est une petite peau très fine) de l’abeille, accédant ainsi à ses fluides internes.
- Alimentation en hémolymphe et corps gras: Après avoir percé la cuticule, le varroa se nourrit non seulement de l’hémolymphe, mais aussi des corps gras de l’abeille. L’hémolymphe est le fluide circulant dans le corps de l’abeille, semblable au sang chez les mammifères, et est riche en nutriments. Les corps gras, quant à eux, sont essentiels pour le stockage des nutriments de l’abeille.
Arrivée du varroa destructor sur Apis mellifera
Le varroa destructor, aujourd’hui l’un des plus grands fléaux pour les colonies d’abeilles domestiques (Apis mellifera), a connu une histoire de propagation complexe et préoccupante.
Transition d’hôte : d’apis cerana à l’apis mellifera
À l’origine, le varroa destructor était un parasite de l’abeille asiatique (Apis cerana). Cette abeille a développé une certaine résistance et des mécanismes de défense contre ce parasite.
Le varroa a commencé à affecter l’abeille domestique (Apis mellifera) après que des colonies d’apis mellifera aient été importées sur l’île de Java. Ce parasite s’est ensuite propagé dans le monde entier, principalement à cause du commerce international des abeilles et des produits de la ruche.
Propagation mondiale du varroa
Le varroa a été repéré pour la première fois sur l’Apis mellifera au Japon en 1957. Après avoir changé d’hôte, passant de l’abeille asiatique (Apis cerana) à l’abeille domestique, le varroa s’est répandu mondialement en raison des échanges et transports d’abeilles.
En France, le varroa a été détecté pour la première fois en 1982, dans les régions du Bas-Rhin et du Var. Malgré les tentatives pour stopper sa propagation, toute la France était considérée comme infestée à la fin de l’année 1989.
Aujourd’hui, le varroa est absent seulement en Australie, dans certaines régions du nord de l’Europe et dans quelques îles comme la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. En juin 2021, le varroa a été détecté dans les colonies de l’île d’Ouessant, dernier territoire métropolitain français qui était jusqu’alors épargné.
Mise à jour : En 2022, le varroa est arrivé en Australie ! 😮
Toutes les ruches et colonies sont infestées par varroa !
La prévalence du varroa dans les colonies d’abeilles est un problème majeur en apiculture, touchant presque toutes les colonies à travers le monde.
Ce parasite omniprésent représente une menace constante pour la santé et la survie des abeilles. La réalité est que presque aucune colonie n’est à l’abri de l’infestation par le varroa, rendant la gestion et le contrôle de ce parasite une priorité absolue pour les apiculteurs.
Cette situation alarmante nécessite une vigilance continue et l’application de méthodes de lutte efficaces chimique et bio techniques pour maintenir la santé des colonies.
L’omniprésence du varroa dans les ruches souligne l’importance cruciale d’une surveillance régulière et d’interventions préventives pour protéger ces précieux pollinisateurs contre les effets dévastateurs de ce parasite.
Conséquences du varroa sur l’abeille et la colonie
Conséquences pour l’abeille
L’alimentation doublement parasitaire du varroa, hémolymphe et corps gras, affaiblit considérablement l’abeille et réduit sa longévité ainsi que sa capacité à stocker des nutriments essentiels.
De plus, le varroa peut transmettre des virus pathogènes, exacerbant les effets néfastes sur la colonie.
Conséquence sur la colonie
L’impact global du varroa sur la santé des colonies d’abeilles est profond et dévastateur.
L’infestation par le varroa déclenche un processus en cascade qui commence par l’invasion du couvain et se termine par l’affaiblissement général de la colonie.
Les symptômes sont multiples et sont réunis autour du nom de varroose. Il y a les ailes déformées, une réduction de la longévité, et une diminution de la capacité des abeilles à collecter de la nourriture et à s’occuper du couvain.
Le varroa agit également comme vecteur de maladies virales, exacerbant les effets de l’infestation et accélérant le déclin de la colonie, pouvant conduire à sa mort, surtout en hiver.
À l’échelle mondiale, la varroose entraîne une diminution significative du nombre de colonies d’abeilles, affectant la biodiversité, la pollinisation, et la production agricole, menaçant ainsi la sécurité alimentaire et la santé des écosystèmes.
Premières mesures et réactions face à l’invasion du varroa
Face à cette invasion, les apiculteurs ont dû s’adapter rapidement. Je détaillerai dans un autre article les moyens de lutte contre le varroa.
Premières mesures
Les premières mesures consistaient à utiliser des produits antiparasitaires similaires à ceux utilisés pour traiter les chiens contre les puces. D’autres produits chimiques acaricides ont été utilisé pour tenter de contrôler la population de varroas dans les ruches.
Moyens de lutte mécanique contre le varroa destructor
Par la suite, les apiculteurs ont également commencé à adopter des pratiques de gestion des ruches plus rigoureuses. Telles que le contrôle régulier des niveaux d’infestation en s’aidant de plancher de ruches semi-aérés ou aérés permettant de compter les varroas qui tombent. Ou encore l’élimination des cadres fortement infestés, comme le couvain de faux bourdon et l’adoption de techniques de gestion comme la mise en cage des reines.
Moyens de lutte chimique contre le varroa destructor
Voici, à ce jour (février 2024), la liste des 14 produits ayant reçu une autorisation de mise sur le marché pour traiter chimiquement le varroa (source : FranceAgriMer).
Certains de ces produits sont utilisables en apiculture biologique.
La liste est dans l’ordre alphabétique
- Apibioxal
- Apiguard
- Apilife Var
- Apistan
- Apitraz
- Bayvarol
- Dany’s Bienenwhol
- Formic Pro
- Maqs acide formique
- Oxybee
- Polyvar
- Thymovar
- Varromed
- Varroxal
Moyens de lutte bio techniques contre le varroa destructor
Les cinq moyens bio techniques pour lutter contre le varroa offrent des alternatives naturelles et efficaces.
Le retrait du couvain de mâle cible les cellules préférées du varroa pour la reproduction, réduisant ainsi leur nombre. L’encagement de la reine interrompt temporairement la ponte, limitant les opportunités de reproduction du varroa. La destruction du couvain, bien que radicale, élimine les varroas cachés dans les cellules operculées. La formation d’essaims artificiels réduit la densité de varroas en divisant la colonie, tandis que le traitement thermique du couvain utilise la chaleur pour tuer les varroas sans nuire aux abeilles.
Ces méthodes, utilisées de manière stratégique, peuvent considérablement diminuer la pression du varroa sur les colonies d’abeilles.
Réinfestation du varroa
Hélas, même si l’apiculteur traite ses colonies et diminue drastiquement la population de varroa dans ses colonies. Ce parasite peut réinfester les colonies ! 😱
En effet, en apiculture il y a la dérive des abeilles lorsque les ruches sont proches entre elles ou encore le pillage entre les colonies. Ces phénomènes font que les abeilles se déplacent ou interagissent entre différentes colonies et facilitent la propagation du varroa d’une colonie à l’autre.
Ainsi, même après un traitement réussi, une colonie peut rapidement se retrouver avec une nouvelle infestation de varroas, annulant les bénéfices du traitement initial.
Cette dynamique souligne l’importance d’une gestion continue et d’une surveillance régulière des colonies pour détecter et traiter rapidement toute réinfestation, afin de maintenir la santé et la viabilité des ruches à long terme.
Et la recherche ?
Parallèlement, des recherches intenses ont été menées pour développer des méthodes de lutte plus durables et moins nocives pour les abeilles. Tels l’utilisation de souches d’abeilles résistantes au varroa, le développement de traitements biologiques et la mise en œuvre de pratiques apicoles améliorées.
La lutte contre le varroa destructor reste un défi majeur pour les apiculteurs du monde entier. La compréhension de son histoire et de sa propagation est essentielle pour élaborer des stratégies efficaces de gestion et de contrôle de ce parasite dévastateur.
Dans des articles futurs, je développerai d’autres aspects du varroa, telles les maladies qu’il engendre sur l’abeille et son cycle de vie. J’aborderai également les méthodes de lutte chimique et mécanique ainsi que le taux d’accroissement annuel de la population du varroa.
Références
- https://www.gdsfrance.org/
- Le Rustica de l’apiculture
- https://www.woah.org/fileadmin/Home/fr/Health_standards/tahm/3.02.07._Varroose_2008.pdf
- https://journals.openedition.org/anthropologiesante/9593
- Guide FNOSAD « Varroa et Varroose »
[…] elles des maladies comme la nosémose, la loque européenne, la loque américaine et des parasites tels que le varroa. Ces maladies peuvent affaiblir les colonies en bonne […]
[…] compréhension de la biologie du parasite, de son cycle de vie, ainsi que des signes d’infestation permet d’agir rapidement et […]
[…] varroa, originaire d’Asie, a été identifié pour la première fois sur l’île de Java en 1904, infestant l’abeille asiatique Apis cerana, qui avait développé une certaine […]
[…] en 1904 sur l’île de Java, il a été initialement identifié sur l’abeille asiatique Apis cerana, qui avait […]
[…] varroa destructor, un acarien parasite, affecte significativement l’abeille domestique Apis mellifera. Pour contrer sa propagation, un traitement varroa est indispensable si on veut […]
[…] pour la première fois en 1904 sur l’île de Java, ce parasite infestait à l’origine l’abeille asiatique, Apis cerana, qui avait […]
Merci Guillaume pour toutes ces informations. Je me demandais pourquoi l’Europe du Nord n’était pas infestée, c’est le climat durant l’hiver qui a empêché la prolifération.
Bonjour Diane, ce n’est pas tant l’hiver qui a empêché la prolifération mais plutôt l’espèce d’abeille infectée. Il y avait un équilibre avec l’apis cerana (asiatique) mais il y a déséquilibre avec notre abeille mellifère (apis mellifera).
[…] Découvert en 1904 sur l’île de Java, il a été initialement identifié sur l’abeille asiatique Apis cerana, qui avait développé une certaine résistance à ce parasite. Cependant, le varroa a commencé à affecter l’abeille domestique après l’introduction de colonies d’Apis mellifera sur l’île de Java. Par la suite, il s’est propagé mondialement, principalement à cause du commerce international des abeilles. […]
Pas super cet acarien ! Quand je le regarde, je ne peux m’empêcher de penser aux poux et aux puces. Je me demande également s’ils sont nuisibles pour l’homme ou les animaux autres que les insectes.
Savez-vous quelle est son utilité pour l’environnement ?
Bonjour Marie, vous avez juste pour la comparaison avec les puces et les poux ! Le varroa n’est pas nuisible pour l’homme quant à son utilité pour l’environnement, je ne sais pas. Il était très bien là sur son île 😙
[…] Dans cet article, je vous présente les indices clés pour identifier la présence du varroa, un parasite dévastateur pour les colonies d’abeilles. […]
[…] vous voulez en connaître plus sur l’origine du varroa et sa biologie, je vous invite à consulter ce premier article de la série sur le […]
Bjr,
La varroa est une maladie que je n’ai jamais ententedu ni vue dans mon pays.
Les abeilles ont une constante vie ici, sauf que sont ménacées par la culture sur brulue et engendrent une maladie prèsque comme la varrooa.
Je vais mener les enquêtes à propos.
Très bonne découverte de cette maladie.
Dans mon pays peu de gent respecte les abeilles.
Bonjour Armand,
Merci pour votre commentaire !
De quel pays êtes-vous ?
N’hésitez pas à me partager des photos de vos ruches et de vos abeilles par email en allant sur cette page https://mespremieresruches.com/a-propos/ 😉
Je suis curieux d’en connaître plus !
Guillaume