Voici une liste d’ennemis des abeilles : pesticides, insecticides, produits neurotoxiques, produits phytosanitaires, herbicides, fongicides, néonicotinoïdes… Par contre, avec tous ces mots, on s’y perd facilement ! Je vais expliquer ce que sont chacun de ces produits et ses effets sur les abeilles.
Cet article fait le lien avec le résumé du film « Disparition des abeilles, la fin d’un mystère”. Dans ce film, plusieurs pistes sont explorées pour expliquer la disparition récente des abeilles: le varroa, les pesticides, les OGM et les ondes.
Définitions et différences
Qu’est-ce qu’un pesticide ?
Un pesticide est un ensemble de substances chimiques, naturelles ou de synthèse, qui sont destinées à repousser ou détruire certains nuisibles (microbes, animaux ou végétaux).
Quelle est la différence entre pesticide et néonicotinoïde ?
Un néonicotinoïde est un type d’insecticide. Les insecticides regroupent l’ensemble des produits chimiques destinés à détruire les nuisibles des champs et malheureusement, ils touchent aussi les abeilles.
Les 3 grandes familles de pesticides: les produits phytosanitaires
Au sein de la grande famille des pesticides, il y a la famille des produits phytosanitaires. Ces traitements phytosanitaires sont répandus surtout le colza et le tournesol. Étymologiquement, phyto signifie plante et sanitaire désigne la santé. Ce sont donc des produits pour la santé des plantes. Cette famille compte 3 types:
- Herbicides: Détruisent les mauvaises herbes
- Insecticides: Tuent les insectes
- Fongicides: Luttent contre les champignons
Les néonicotinoïdes font partie des insecticides. Ce sont donc des pesticides de la famille phytosanitaire et du type insecticide. C’est long à dire, mais en tout cas c’est clair !
Ce sont surtout les insecticides qui sont en cause dans la plupart des intoxications d’abeilles
Quel est le problème avec les pesticides ?
Les pesticides sont une des principales causes de la disparition des abeilles. Tout comme la pollution, les parasites comme le varroa, les virus comme la nosémose, les maladies comme les loques américaines et européennes, les OGM, les espèces invasives comme le frelon asiatique et le coléoptère de la ruche, les ondes hertziennes. Toutes ces causes participent au syndrome d’effondrement des colonies: il y a des causes extérieures comme celles précédemment évoquées et également des causes intérieures avec la pauvreté alimentaire des aliments donnés aux ruches: nourrissement en sirop ou candi.
Comment est-ce que les pesticides agissent sur les plantes ?
Les pesticides sont employés pour la protection des cultures et également en usage d’ordre vétérinaire contre les moustiques, poux, puces. C’est à partir de 1942 que l’usage des insecticides organiques de synthèse se répand.
Avant la deuxième moitié du XXe siècle, on utilisait des substances « naturelles » aux vertus insecticides: sel d’arsenic, produits fluorés, produits d’origine végétale (nicotine, pyrèthre, roténone, sébadille …).
Dorénavant, les insecticides se divisent en adulticides, ovicides et larvicides. Ils pénètrent dans le corps des insectes par contact, ingestion, respiration. Le système nerveux est ensuite atteint. Ils sont rarement sélectifs sur les animaux ciblés. Ils sont également toxiques pour les insectes utiles: coccinelles et pollinisateurs. La persistance dans l’environnement est également un danger pour certains insecticides comme ceux composés des molécules comme l’organochloré.
Qu’est-ce qu’un pesticide systémique?
Un traitement au pesticide systémique correspond à un mode d’action de la substance chimique : elle pénètre dans la plante par ses graines, ses racines, ses feuilles, ses écorces. Elle se retrouve ensuite dans ses différents organes et persiste dans le temps et dans sa concentration.
Les pesticides systémiques sont utilisés préventivement sur les territoires cultivés en monoculture.
Comment les abeilles peuvent rentrer en contact avec des pesticides ?
Par le pollen et le nectar
Ce sont les deux sources de nourriture principales des abeilles. Sans ces deux ressources, les abeilles ne peuvent vivre. On dit souvent que le pollen est le pain des abeilles alors que le nectar, lui, sert directement à la fabrication du miel. Les abeilles peuvent, sans le savoir, apporter à la ruche du pollen ou du nectar imprégné de pesticides.
Par l’eau
Une ruche consomme annuellement environ cent litres d’eau. Les abeilles ne sont pas sélectives : elles peuvent pomper de l’eau dans une rivière, dans une mare, dans un système d’irrigation ou dans des endroits ayant reçu des résidus de pesticides.
Quels sont les effets des pesticides sur les abeilles ?
Les abeilles souffrent de deux manières des pesticides: ils agissent sur leur système nerveux et également dans l’organisme des abeilles.
Les pesticides n’affectent pas seulement les abeilles, mais également tous les autres pollinisateurs et insectes: bourdons ardents, bourdon tricolore, mégachiles, agapostémons, abeilles charpentières, abeilles coucous, osmies, syrphes, guêpes, volucelles, cantharides, sphinx colibri …
L’effet neurotoxique des pesticides sur les abeilles
Depuis 1990, de nouveaux produits non sélectifs agissent sur le système nerveux des insectes. Ils sont différents, car ils sont systémiques. Ils agissent à très faibles doses avec une action particulière sur les cellules nerveuses. Il y a par exemple le Gaucho (Imidaclopride) ou le Régent (Fipronil)
Ce type de produits agit de manière irréversible sur des récepteurs des cellules nerveuses conduisant à une baisse de la motricité, tremblement et prostration des insectes.
Les effets neurotoxiques sont ravageurs: affaiblissement de la ruche, augmentation de la mortalité, reine moins féconde et vivant moins longtemps, fertilité plus faible des faux bourdons.
L’intoxication des abeilles
L’intoxication des abeilles résulte souvent d’un mauvais emploi des pesticides: respect des doses, conditions météo lors de l’épandage, association dangereuse entre plusieurs produits successifs. Ces intoxications se caractérisent de deux façons:
Intoxication létale
Une intoxication létale entraine la mort, elle peut être due à des intoxications aigües et des intoxications chroniques:
Intoxication chronique
Elle est difficile à détecter, c’est l’effet d’une exposition prolongée à de faibles doses d’insecticides. Les ressources nécessaires au développement de la colonie (pollen et nectar) ont des doses infimes d’insecticides et sont récoltées par les butineuses et stockés dans la ruche où ils servent à nourrir les larves et à fabriquer de la gelée royale. Cette exposition chronique conduit à une baisse de la longévité de la reine, une baisse de la fécondité des faux bourdons, une population de la colonie en baisse, des pertes hivernales en hausse. Ces pesticides ont une durée de vie prolongée et peuvent affecter les pollinisateurs plusieurs années après leur application. Ce type d’intoxication est lente et insidieuse et aboutit à une dépopulation de la ruche.
Intoxication aiguë
Ce type d’intoxication est plus facile à déceler, car la mort soudaine des abeilles est un indicateur. On la détecte lorsqu’il y a plusieurs centaines, voire des milliers d’abeilles mortes sur le sol devant la ruche. Cette intoxication résulte de l’exposition directe aux pesticides ou aux insecticides lors d’épandages, par exemple.
Intoxication sublétale
Il n’y a pas de mortalité, mais des troubles comportementaux, physiologiques ou biochimiques. Par exemple une perturbation du sens d’orientation des butineuses qui ne retrouveront pas le chemin de leurs ruches
Je vous partage une animation crée par le site Le Monde expliquant en quelques minutes le déclin des abeilles
Les réglementations des pesticides: protéger les abeilles
La réglementation des traitements phytosanitaires est un vrai combat notamment contre des produits comme le Gaucho en 2004 puis du Régent, ou encore le Cruiser en 2012. Ces produits ont des effets toxiques sur les abeilles et ont vu leur retrait justifié par des preuves scientifiques de plus en plus nombreuses.
L’homologation des produits phytosanitaires est en pleine évolution au niveau européen. Auparavant, l’Europe donnait une décision sur l’autorisation ou non d’un produit et les États européens avaient le choix de pouvoir utiliser le produit ou non. Ce qui est envisagé en ce moment est que si une molécule n’est pas homologuée à l’échelle de l’Europe, aucune préparation contenant cette molécule ne pourra être autorisée dans quelque État que ce soit. Cette disposition ne peut qu’être accueillie favorablement.
Le cadre juridique européen pour la protection de l’abeille est défini par une exigence réglementaire de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) selon laquelle un pesticide n’est autorisé que si son utilisation entraine une exposition négligeable des abeilles, ou n’aura pas d’effets inacceptables aigus ou chroniques sur la survie et le développement des colonies, compte tenu des effets sur les larves d’abeille et le comportement (règlement n°1107/2009)
Comment éviter que les abeilles ne rentrent en contact avec les pesticides ?
Il y a plusieurs moyens pour éviter que les abeilles ne rentrent en contact avec des pesticides. Avant de vous les expliquer, il faut savoir que les abeilles rayonnent 3 kilomètres autour de leur ruche.
- Le premier moyen est de montrer l’exemple: adopter une approche différente de la gestion de vos espaces verts en éliminant l’utilisation de pesticides
- Vous pouvez prendre contact avec votre mairie afin de le sensibiliser sur l’importance d’adopter des gestions des espaces verts sans pesticides ni produits phytosanitaires afin de créer des espaces particulièrement épanouissants pour les abeilles.
Les villes, nouvel eldorado pour les abeilles ?
Les villes permettent aux abeilles d’avoir une source en nectar et en pollen varié grâce aux multiples essences et floraisons présentes en ville. Il y a des floraisons étendues sur une bonne partie de l’année permettant ainsi aux abeilles d’avoir un approvisionnement régulier en nectar et pollen.
L’effet de la pollution sur le miel
Par contre, bien que les abeilles soient davantage à l’abri des pesticides qu’à la campagne, la pollution urbaine pénalise tout de même la qualité du miel à cause notamment des gaz émis par les pots d’échappement, des émissions dû au chauffage des logements.
Mis à part la pollution, il y a moins de résidus chimiques dans un miel de ville que dans un miel provenant d’une campagne où il y a des cultures traitées.
Les zones industrielles et la circulation automobile sont des sources de pollution et d’émission d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), l’air ambiant y est moins sain qu’à la campagne. Toutefois, le miel étant composé à 97M d’eau et de sucre hydrophile: les HAP étant hydrophobes (ils ne peuvent pas se dissoudre dans l’eau) on n’en retrouve pas dans le miel
Traité Rustica d’apiculture
Une étude menée par l’INRA (Institut National de Recherche Agronomique) d’Avignon a permis d’estimer les zones privilégiées par les abeilles sauvages. Après deux années d’observation et de prélèvements sur 24 sites de la métropole lyonnaise, ils ont pu démontrer que les abeilles sont moins nombreuses aux endroits où il y a plus la densité de construction représente 70% de l’espace comparé aux zones agricoles avec une densité de construction de 30%. Toutefois, les zones périurbaines construites à 50% ont une densité d’abeilles très importantes.
Biographie et webographie
- https://leshorizons.net/cest-quoi-les-neonicotinoides/
- https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/agriculture/cinq-questions-sur-les-neonicotinoides-ces-insecticides-interdits-depuis-2018-et-reautorises-pour-2021-par-le-gouvernement_4068781.html
- https://www.unaf-apiculture.info/nos-actions/pesticides-et-abeilles.html
- https://monjardinmamaison.maison-travaux.fr/mon-jardin-ma-maison/courrier-des-lecteurs/70500-70500.html
- https://www.apiservices.biz/fr/articles/classes-par-popularite/2176-pesticides-elevages-menacent-abeilles
- « Une ruche en ville, c’est possible » Gaëlle de Broissia & Julien Desodt
- « Les fiches pratiques de l’apiculteur » de Gilles Fert
- J’installe une ruche dans mon jardin de Claude Merle et Rémy Bacher
- « Une ruche dans mon jardin: Fabriquez votre ruche horizontale et récoltez votre miel » de Pierre Javaudin
- « L’abeille et la ruche : Manuel d’apiculture écologique » d’Alain Péricard
- Le traité Rustica d’apiculture
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Dessinatrice, je vous propose de découvrir sur ce sujet une série de dessins aux crayons de couleur évoquant, par une suite d’abeilles mortes, la pollution par les substances chimiques et les pesticides utilisés dans l’agriculture. Il n’y a pas que les grosses bêtes qui disparaissent …. A découvrir : https://1011-art.blogspot.com/p/vous-etes-ici.html
Cette série sera présentée au Muséum de Genève à partir d’octobre 2021.
Mais aussi, en lien direct, une réflexion sur l’utilisation des produits phytosanitaires : https://1011-art.blogspot.com/p/hommage-magritte.html
[…] blog mes premieresruches.com où l’on parle entre autre des pesticides et de leurs effets sur les abeilles.Découvrez d’autres gestes concrets pour […]
Merci Guillaume pour cet article complet digne d’un reportage. En effet, je ne connais pas la politique de ma ville pour l’entretien des espaces vert. En Revanche, j’ai vu des sacs pour piéger les nuisibles sur les arbres autour d’un parc chez moi. J’espère que cela ne tue pas les abeilles.
J’ai un jardin de 150 m2 environ et j’ai pris pour habitude d’enlever les mauvaises herbes à la main. Comme je souhaite faire un petit jardin (quelques tomates et concombre) j’ai banni les pesticides chez moi.
Super article vraiment très complet! Dans ce contexte où l on entend parler de plus en plus des neonicotinoides, l article apporte un reel éclairage sur qu est ce que sont les pesticides , comment ils agissent et comment sont ils néfastes pour la biodiversité !
Merci pour cet article bien documenté. Je connaissais bien sûr le problème mais pas tous les détails. Je trouve que l’on sous-estime notre pouvoir de consommateurs. Changeons nos habitudes d’achats sans attendre les politiques et l’agro-alimentaire nous suivra 🙂