Le comptage du varroa est une pratique importante en apiculture parce qu’elle permet d’évaluer l’infestation par le varroa, un acarien parasitaire qui représente une menace sérieuse pour les abeilles.
Il est recommandé de faire un comptage varroa à quatre moments clés de l’année : à la sortie de l’hivernage, au milieu du printemps, en juillet, et à l’automne. Ces mesures peuvent ensuite être comparées aux seuils recommandés par les organisations sanitaires apicoles.
Il existe trois méthodes principales de comptage du varroa : le comptage des chutes naturelles, le comptage des varroas phorétiques, et le comptage dans le couvain.
Chacune de ces techniques a ses particularités et je vais vous les présenter.
Un peu de contexte sur le varroa, la varroose et ses conséquences
Le varroa
Le varroa destructor est un acarien parasitaire redoutable qui pose une menace majeure pour l’abeille domestique Apis mellifera.
Découvert en 1904 sur l’île de Java, il a été initialement identifié sur l’abeille asiatique Apis cerana, qui avait développé une certaine résistance à ce parasite.
Cependant, le varroa a commencé à affecter l’abeille domestique après l’introduction de colonies d’Apis mellifera sur l’île de Java. Ce parasite s’est ensuite propagé mondialement, principalement à cause du commerce international des abeilles.
La prévalence du varroa dans les colonies d’abeilles est un problème majeur en apiculture, touchant presque toutes les colonies à travers le monde.
La varroose
La varroose est une maladie complexe et dévastatrice causée par le varroa destructor, affectant gravement les abeilles domestiques et l’apiculture mondiale.
Cette maladie résulte de l’infestation par le varroa, qui se nourrit de l’hémolymphe et des corps gras des abeilles. Ces ponctions entraînent un affaiblissement significatif de l’abeille, une vulnérabilité accrue aux maladies, et une perturbation de leur capacité à fonctionner normalement au sein de la colonie.
La varroose a des conséquences multiples, affectant non seulement l’abeille mais aussi la santé globale de la colonie.
L’impact du varroa sur les colonies d’abeilles
L’impact global du varroa sur la santé des colonies d’abeilles est profond et dévastateur.
L’infestation par le varroa déclenche un processus en cascade qui commence par l’invasion du couvain et se termine par l‘affaiblissement général de la colonie.
Les symptômes incluent des ailes déformées, une réduction de la longévité, et une diminution de la capacité des abeilles à collecter de la nourriture et à s’occuper du couvain.
Le varroa agit également comme vecteur de maladies virales, exacerbant les effets de l’infestation et accélérant le déclin de la colonie, pouvant conduire à sa mort, surtout en hiver.
À l’échelle mondiale, la varroose entraîne une diminution significative du nombre de colonies d’abeilles, affectant la biodiversité, la pollinisation, et la production agricole, menaçant ainsi la sécurité alimentaire et la santé des écosystèmes.
Pourquoi faire un comptage de varroa
Le comptage de varroa est cruciale car il permet d’évaluer le niveau d’infestation du varroa dans la colonie. Le comptage varroa donne une unité de mesure concrète, une estimation chiffrée, plus ou moins fiable selon la méthode utilisée
Sans comptage varroa, il n’est pas possible de déterminer si le niveau de parasite peut nuire à la santé de la colonie ou non.
L’apiculteur peut certes trouver les traces du varroa en visitant ses ruche. Par exemple, en observant des abeilles mortes en sortant de l’alvéole ou encore en décelant des déjections de varroa dans les cellules.
Néanmoins, ces observations ne donnent pas d’indice précis sur l’ampleur de l’infestation.
Voici d’autres arguments qui montrent l’importance de l’estimation du niveau d’infestation de varroa :
- estime la nécessité et l’urgence d’un traitement acaricide ou alternatif
- offre un moyen d’évaluer l’efficacité d’un traitement en comptant après le traitement
- des colonies saines avec des niveaux de varroa contrôlés produisent généralement plus de miel
- En connaissant le niveau d’infestation, l’apiculteur peut gérer plus efficacement son temps et mieux gérer les colonies qui en ont le plus besoin
- Le comptage aide à déterminer le moment optimal pour appliquer des traitements anti varroa et maximise leur efficacité
Ne pas compter le varroa c’est comme négliger ses propres contrôles médicaux réguliers ou encore ignorer des symptômes mineurs qui, s’ils sont détectés et traités à temps, peuvent prévenir des complications graves.
Dans le cas du varroa, si l’apiculteur ne traite pas à temps, ses ruches meurent … tout simplement.
Les 4 périodes clés du comptage varroa
Pour une gestion optimale de l’infestation par le varroa, il serait idéal de réaliser un suivi chaque mois.
Cette fréquence de contrôle est difficile à tenir pour des apiculteurs amateurs 🥵️.
La FNOSAD (Fédération Nationale des Organisations Sanitaires Apicoles Départementales) recommande une surveillance à 4 moments clés de l’année.
Ces moments ont été identifié comme ayant un impact significatif sur la santé de la colonie : passage d’une saison à une autre, développement du couvain, suivi après un traitement chimique etc
Première période : la sortie de l’hivernage
La première période cruciale est à la sortie de l’hivernage, particulièrement si aucun traitement n’a été appliqué durant l’hiver.
L’évaluation de l’infestation permettra de déterminer si un traitement chimique et/ou bio technique est nécessaire avant la première miellée. Cela permet d’assurer que les colonies entrent dans la saison en bonne santé.
Deuxième période : au milieu du printemps
Au milieu du printemps, vers mai, un autre contrôle est conseillé. C’est un bon moment pour mesurer le niveau d’infestation du varroa et décider si des mesures pour diminuer l’infestation sont nécessaires.
À ces stade, l’utilisation de méthodes biotechniques est souvent préférable, car elles peuvent efficacement réduire la population de varroas sans affecter la qualité du miel.
Troisième période : juillet
En juillet, l’attention doit être redoublée car la population de varroas peut atteindre des niveaux critiques. Un traitement à ce moment peut être urgent, même si cela signifie renoncer à une miellée imminente.
L’objectif est de préserver la santé et la viabilité des colonies, ce qui peut parfois exiger des décisions difficiles, mais cruciales.
Quatrième période : l’automne
Enfin, un suivi à l’automne, après le traitement de fin d’été, est indispensable pour vérifier l’efficacité du traitement appliqué.
Ce comptage permet à l’apiculteur de s’assurer que ses colonies entrent en période hivernale avec un faible niveau d’infestation de varroa.
Doit-on faire un comptage varroa sur toutes nos ruches ?
Pour les ruchers de petite taille, il est recommandé de tester toutes les colonies pour évaluer la population de varroas.
Cependant, lorsque le nombre de ruches augmente, c’est impossible de tester chaque colonie. Dans ce cas, il est judicieux de procéder à des mesures sur un échantillon représentatif des colonies.
Par rapport aux nombres de colonies à, je vous partage tel quel, le tableau partagé par la FNOSAD dans son guide « Varroa et Varroose » (Fédération Nationale des Organisations Sanitaires Apicoles Départementales) en page 72.
Taille du rucher | Jusqu’à 5 | De 6 à 10 | De 11à 20 | De 21 à 50 | Plus de 50 |
Nombre de colonies à échantillonner | Toutes | 5 | 6 | 8 | 13 |
Les 3 méthodes de comptage du varroa
Comptage des chutes naturelles de varroa
Principe
Cette technique de comptage du varroa implique de surveiller les varroas qui tombent naturellement et que l’on peut compter sur le fond du ruche
Matériel
- Un fond de ruche entièrement grillagé
- Un plateau qui se glisse sous la ruche
- Une graisse alimentaire : beurre, huile, graisse à traire, saindoux
Comment fait-on concrètement
- Placez le plateau graissé sous la ruche
- Tous les 2 à 3 jours max, compter les varroas tombées et noter le nombre de varroas
- Nettoyer le plateau entre chaque comptage
La période de comptage dure 7 à 10 jours. Vous allez donc compter entre 5 à 10 fois au total.
Les seuils
Une fois que la période de comptage de varroa est terminé, faites la moyenne des chutes de varroa en faisant ce calcul
total du nombre de jours
Voici un tableau qui indique les seuils de varroas à ne pas dépasser. Si ces seuils sont dépassés, il faut mettre en place une lutte chimique avec en complément une lutte bio technique.
Période | Fin d’automne, hiver | Sortie d’hivernage | Printemps (mai-juin) | Eté (juillet-début août) |
---|---|---|---|---|
Nombre de varroas par jour | 0,5 | 1 | 3 | 10 |
Comptage des varroas phorétiques
Principe
Cette méthode de comptage des varroas mesure le nombre de varroas présents sur un échantillon d’abeilles adultes pour calculer un taux d’infestation.
L’échantillon doit être d’environ 300 abeilles.
Le taux d’infestation calculé est appelé le nombre de varroas phorétiques (VP) pour cent abeilles. L’abréviation VP/100 est couramment utilisée.
Matériel
- Un shaker
- Un couvercle grillagé pour le shaker
- Une des 3 solutions pour décrocher les varroas : détergent, sucre glace ou CO2
- Un plateau blanc pour faire le comptage
Comment fait-on concrètement ?
Pour récupérer l’échantillon d’abeilles adultes, il y a 2 méthodes :
- Secouer un cadre de couvain fermé au-dessus d’un toit de ruche retourné. C’est important de prélever des abeilles d’intérieur. Verser ensuite les abeilles dans un bocal (shaker) de la bonne taille
- Faites glisser un bocal de haut en bas sur les abeilles pour que les abeilles y tombent (voir la vidéo ci dessous d’une Saison Aux Abeilles)
Comment savoir que j’ai environ 300 abeilles ?
Vous pouvez le savoir de deux manières :
- avec une indication du volume sur le shaker. Vous pouvez mettre une marque indiquant un volume de 100 à 120ml qui est l’espace occupé par 300 abeilles.
- en faisant une pesée du saker, après la tare bien sûr. Une abeille fait en moyenne 0,1g, vous aurez besoin de 30g d’abeilles (300 x 0,1g = 30g)
Les 3 méthodes pour décrocher les varroas
- Roulement au sucre glace : Incorporer du sucre glace dans le shaker pour détacher les varroas des abeilles. Secouer vigoureusement le shaker, couvercle vers le bas, pour faire tomber les varroas sur un plateau blanc
- Méthode au détergent ou à l’alcool : congeler l’échantillon d’abeilles. Ensuite tremper l’échantillon dans une solution avec le détergent et agiter vivement. Compter les varroas détachés après avoir passé les abeilles au tamis
- Méthode au CO2 😴 : Injecter du CO2 dans un shaker adapté pendant plusieurs secondes pour endormir les abeilles de l’échantillon. Secouer activement le shaker. Compter les varroas qui sont tombés. Vous pouvez ensuite remettre les abeilles dans la ruche
⚠️ Veiller à vérifier systématiquement que la reine ne se trouve pas dans votre échantillon ! Le mieux est de marquer vos reines pour les distinguer des abeilles.
Les seuils
Afin de calculer avec précision le VP/100 (nombre de varroas phorétiques pour cent abeilles), vous devrez systématiquement peser l’échantillon.
Voici la formule de calcul du VP/100
Varroas Phorétiques (VP) / 100 abeilles = Nombre de varroas dans l’échantillon Poids de l’échantillon × 0,1 × 100
Si le seuil de VP/100 est supérieur aux valeurs du tableau ci dessous, il est recommandé de mettre en place des mesures de luttes chimiques et bio technique adaptée
Période | Automne, après traitement d’été | Printemps (mai-juin) | Eté (juillet-début août) |
---|---|---|---|
Nombre de varroas par jour | 0,3 | 3 | 4 |
Comptage du varroa dans le couvain
Principe
Le comptage du varroa dans le couvain consiste à désoperculer le couvain operculé pour évaluer le nombre de varroas dans les cellules
Matériel
- Herse à désoperculer , comme celle utilisée lors de la récolte
- Une loupe 🔍
Comment fait-on concrètement
- Sortir 1 cadre de couvain de la ruche et le secouer pour enlever toutes les abeilles adultes
- Avec la herse, embrocher les nymphes jusqu’à avoir désoperculé environ 200 cellules
- Compter le nombre de cellules infestées et le nombre de cellules désoperculées
Les seuils
Pour obtenir le pourcentage d’infestation, la FNOSAD recommande de faire le calcul suivant :
Pourcentage d’infestation = nombre de cellules infestées nombre de cellules désoperculées × 100
Si le taux d’infestation dépasse les 15 %, il est conseillé d’adopter des mesures pour réduire la pression exercée par le varroa.
Précaution !
⚠️ L’estimation dans le couvain doit se faire surtout dans du couvain mâle
⚠️ Plutôt que de faire le comptage au rucher. Il est plus pratique d’extraire le rayon de la ruche, de découper moins d’un dixième du cadre, puis de réaliser le comptage à domicile, sur une table avec un support blanc. Cette méthode est plus confortable et réduit les risques d’agression par les abeilles.
⚠️ Cette méthode de comptage est peu fiable (Guide « Varroa et varroose » de la FNOSAD)
Tableau comparatif des différentes méthodes de comptage du varroa
Avantages ✅ | Inconvénients ❌ | |
---|---|---|
Méthode 1 Comptage des chutes naturelles de varroa | Non invasive, sans ouverture de la ruche Aucune abeille n’est tuée Utile pour évaluer le risque d’infestation Permets le suivi pendant le traitement Détecte les infestations légères | Précision variable, influencée par la présence de couvain Ne considère pas la taille de la colonie Dépends du comportement d’épouillage des abeilles Peu fiable en cas d’effondrement de la colonie Risque de perte de varroas à cause des fourmis et forficules Nécessite des planchers grillagés spécifiques |
Méthode 2 Comptage des varroas phorétiques -Sucre glace | Peu destructrice Résultats immédiats Coût modéré | Invasive Sensible aux conditions météorologiques Moins fiable durant la miellée |
Méthode 2 Comptage des varroas phorétiques -Détergent ou alcool | Très efficace pour détacher les varroas Permets un comptage différé Faisable durant la miellée | Invasive Destructrice |
Méthode 2 Comptage des varroas phorétiques - CO2 | Peu destructrice Résultats immédiats | Invasive Efficacité limitée pour déloger les varroas Moins fiable durant la miellée |
Méthode 3 Comptage du varroa dans le couvain | Facile à mettre en œuvre | Comptage précis laborieux Invasive Offre seulement une estimation partielle de l’infestation |
Wow, quel travail ce comptage de varroa ! On ne s’imagine pas du tout le travail (et l’amour pour ce travail !) qui se cache derrière un pot de miel… c’est impressionnant !
Vous avez tout à fait raison Jessica. L’apiculture est bien plus technique que l’on croit et ce n’est pas simplement la récolte du travail des abeilles mais également le soin qu’on leur apporte !
Je ne connaissais pas le varroa. Mais quelle saleté ce truc qui déforme nos abeilles ! D’ailleurs je suis allergiques aux acariens.
Oui c’est une vraie sal$perie 😖
Merci pour cet article instructif. Il éclaire sur l’importance du comptage du varroa, un ennemi redoutable des abeilles. Les quatre périodes clés de comptage et les trois méthodes présentées sont des outils précieux pour tout apiculteur.
Merci pour votre commentaire Patricia, oui le comptage est très important !
Ton article sur le comptage du varroa est très instructif. J’apprécie particulièrement la clarté avec laquelle tu décris les différentes méthodes. C’est un sujet crucial pour la santé des abeilles et tu l’abordes avec un mélange parfait de précision et de simplicité. Tes conseils pratiques seront certainement d’une grande aide pour les apiculteurs, débutants ou expérimentés. Merci pour ce partage !
Meric Elma, j’espère aider le plus grand nombre !
Merci pour cet article, c’est amusant de constater que l’on peut parler d’échantillon représentatif même chez les abeilles.
Oui 😄